[Ceux du Nord-Ouest – Zadie Smith – 2012]
Voici une auteur dont on m’avait mille et une fois assuré le talent, la justesse de la plume, le regard affuté sur « les choses de la vie ». Je me suis attaquée à sa bibliographie un peu au hasard, avec NW, roman acclamé à sa sortie (« Absolutely brilliant. So electrically authentic. » – Time)… et que je referme à peine trente pages avant la fin, absolument lassée, très énervée et heureuse de bazarder (enfin !) cette performance littéraire qui m’a occupée quelques jours durant.
Le talent, certes, est bien là : il explose à chaque ligne, à travers une écriture étincelante, intensément créative et d’une acuité géniale… malheureusement mise au service d’un vide narratif pesant, sans queue ni tête, qui a fini – au bout de trois-cent pages de lutte – par m’endormir tout à fait. Il ne se passe rien, ou plutôt, une multitude de petites choses insignifiantes, sans trame, comme perdues dans un cosmos étrange et déstructuré. Deux personnages : Leah et Keisha/Nathalie, la trentaine. Plus Félix et Nathan, âmes égarées en proie au crack. Des temporalités floues : toute une vie ou quelques heures. Le fil est dur à suivre. Peut-être le fil ne veut-il pas être suivi.
« NW », c’est le code postal appliqué au nord de Londres, quartier-village où évoluent les destins créés par Smith – tous malheureux, tous désabusés. Les personnages se rencontrent : cela donne lieu à des dialogues d’un réalisme épatant, car ponctués d’expressions typiquement londoniennes, typiquement étrangères, typiquement ghetto. L’écriture se mue alors en une bande sonore brute, sans artifices dans la rédaction, crachée comme un rap ; j’ai énormément apprécié ce côté « poésie urbaine », absolument maîtrisé par Zadie Smith et qui m’a empêché de reposer le bouquin après quelques pages.
Le lecteur se rend vite à l’évidence : NW livre une prose sur le quotidien, rien de plus. Le style – grandiose, on l’a vu – ne parvient pas à repêcher la faiblesse de la narration, voire même son inutilité : car Smith, bien décidée à exercer sa plume sur des petits bouts de rien, saisit tous les prétextes pour babiller sur le néant, quitte à accumuler les réflexions un peu creuses et les excentricités m’as-tu-vu. C’est décousu, en bordel, « art moderne », dira-t-on : le work in progress est à la mode. Et puisque le bonheur n’offre rien d’intéressant à raconter, la romancière habille ses personnages d’un cynisme déprimant, jusqu’à les transformer en clichés ambulants. Oh dear…
Je sors de cette découverte assez déçue, malgré l’excellente et indéniable qualité d’écriture dont fait preuve Zadie Smith. Pour ceux qui souhaiteraient tenter l’aventure, je recommande fortement la lecture en anglais (peu difficile) : j’ai feuilleté quelques extraits de la version française, mais la traduction reste difficilement fidèle à l’oralité du texte en VO. Quant à moi, je compte poursuivre dans ma découverte de Smith avec White Teeth (pour lequel les critiques sont apparemment plus unanimes).
Je n’ai jamais lu de roman de cette écrivaine… À découvrir!
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J’ai lu « De la beauté » il y a quelques années et je me suis plutôt ennuyée.
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Ha. Bon, comme on me l’a conseillé par ailleurs, j’y jeterai peut être un coup d’oeil quand même… à voir.
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Je n’ai jamais lu l’auteur, mais c’est dommage que ce talent d’écriture ne soit pas au service d’une histoire qui donne envie de la lire…
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Je n’ai jamais lu cette auteur, mais ton article ne me donne pas envie de tenter !
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On m’a dit que De la beauté, de la même auteur, était très bien. Peut être n’ai-je pas commencé par le bon.
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Décidément, il va falloir que je me plonge dans Zadie Smith! J’avais lu un article de presse qui m’avait donné envie… La chronique de Cécile (sur notre blog) avait continué d’attiser ma curiosité. Et à la lecture de votre article, je me dis qu’il faut que je m’y mette! Finalement, vous êtes un peu plus « incisive » que Cécile mais je vois des similitudes dans vos avis respectifs. Je vais la mettre dans ma liste pour cet été! Mais on aimerait en lire tellement!
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