[La succession – Jean-Paul Dubois – 2016]
Et c’est reparti pour une nouvelle édition du prix du Roman des étudiants, auquel je participe une fois encore en tant que jurée ! Mine de rien, pour moi qui ne suis pas tellement férue de littérature française, à laquelle je préfère nettement la production étrangère, ce prix présente un avantage : celui de me faire découvrir quelques auteurs contemporains bien ancrés dans le monde des lettres, mais desquels je n’ai – à quelques exceptions près – jamais entendu parler… sûrement par manque d’intérêt. Le mois de Novembre sera donc 100% bleu-blanc-rouge sur le blog, et l’on commence dès à présent avec La succession, de Jean-Paul Dubois.
C’était… pas si mal. Style un poil agaçant – j’y reviendrai – mais histoire prenante et plutôt bien ficelée. Paul Katrakilis, (très) grand enfant, a exporté sa passion pour la pelote basque à Miami, où il touche trois francs six sous à tirer des balles de buis sur les frontons du Jaï-alaï local. Son père, médecin à Toulouse, décède. Un suicide, ou plutôt, un suicide de plus : la famille restreinte de Paul compte déjà trois disparus volontaires, trois absents aux morts étudiées : mère, oncle, grand-père.
Voici donc Paul catapulté outre-Atlantique à la faveur d’un retour au triste bercail dont jaillissent les souvenirs : l’occasion d’égrener les portraits en règle du cortège des suicidés, à grand renfort de loufoque – c’est à la mode – et d’appels à la grande Histoire.
Spyridon Katrakilis, le grand-père, a dérobé une lamelle du cerveau de Staline lors de son autopsie. Adrian Katrakilis, le père, se cuisinait innocemment une tranche de veau alors qu’Anna Galienni, la mère, mourrait à quelques mètres, dans un garage saturé de dioxydes. Jean-Paul Dubois fait dans l’humour grinçant, sature son récits de « détails qui tuent », jusqu’à grimer les personnages – morts y compris – en clichés ambulants. Soit. Cela fait sens au regard du style, tout aussi référencé et riche en vocabulaire d’initiés, en clins d’œil appuyés, en sentences insolites en-veux-tu-en-voilà, et avec lequel j’ai longuement bataillé… jusqu’à ce que le roman délaisse ses excentricités inutiles pour, enfin, gagner en profondeur – à l’image du héros propulsé tardivement hors de son éternelle adolescence.
La fin est belle – elle arrive seulement un chouïa trop tard : il y est question de cette succession, intime et morale, des non-dits du corps familial comme du médical, et de l’émancipation – hélas vouée à l’échec – d’un fils jamais lavé des souillures laissées là par les absents. Déchaussé de ses gros sabots, Jipé Dubois délaisse (enfin !) sa machine à LOL pour emmener son lecteur vers des dimensions plus sages, plus discrètes, plus humaines, jusqu’aux derniers mots qui offrent un brillant point d’orgue à ce roman qui pourtant commençait sur de bien mauvaises notes…
Vous avez une façon plaisante de décrire des livres, sans commentaires pompeux, mais sans trop de subjectivité non plus. Bref, c’est très sympa, continuez !
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Merci, je suis ravie que cela vous plaise !
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Je suis tout à fait d’accord avec le commentaire de la personne précédente ! Très belle chronique. J’ai lu un seul livre de JP Dubois (Une vie française) qui m’avait bien plu. Le côté loufoque n’est pas pour moi non plus ! Au passage, félicitations pour avoir été retenue dans le jury.
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Merci ! C’était mon premier JP Dubois pour ma part, mais je ne pense pas que je retenterai l’expérience, enfin c’est à voir.
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Je te laisse voir, mais en tant que lecteur de ton blog, je suis plutôt ravi que tu t’intéresses moins à la production littéraire actuelle, ce qui nous permet de faire de belles découvertes !
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Bon courage pour cette nouvelle session !
N’étant pas en France cette année je n’ai pas pu participer… Ceci dit les livres m’inspiraient moins que la dernière fois ! (sauf peut-être celui de Gaël Faye)
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La sélection ne m’inspire pas tellement aussi, mais je me suis inscrite avant qu’elle soit annoncée :). Quoi que, je fais quand même de belles découvertes, en ce moment je lis 14juillet d’Eric Vuillard et j’aime beaucoup !
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J’ai hâte d’en savoir plus alors !
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C’est super d’être jurée, je viens de vivre cette expérience avec la sélection polars chez Points. Bonnes lectures alors ! De Dubois, j’ai lu « le cas Sneijder » dernièrement et j’ai bien aimé ce mélange d’humour et de désespoir…
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Un titre qu’il me tarde de découvrir !
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J’espère que tu l’apprécieras mieux que moi 🙂
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J’avais entendu dire beaucoup de bien de ce roman, j’étais même tentée de le lire, mais vous m’avez tout à fait dissuadée !
Merci donc pour ce commentaire éclairant !
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J’en ai (depuis l’article) discuté avec les autres membres du prix étudiant… et les avis sont malheureusement quasi unanimes : rien de formidable, hélas, dans ce roman !
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C’est-à-dire qu’il me semble qu’il avait concouru pour le Goncourt … mais en effet ça ne veut rien dire.
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Oh oui, il y a de très mauvais livres qui sont dans les listes de tous les prix, et de très bons qui n’y sont jamais !
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J’ai un avis plus positif, même si j’ai été gênée par les digressions. J’ai bien aimé ce roman, le premier pour moi de cet auteur.
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